« Jésus proclamait et annonçait la Bonne Nouvelle. »
(Lc 8, 1-3)
En ce temps-là, il arriva que Jésus, passant à travers villes et villages, proclamait et annonçait la Bonne Nouvelle du règne de Dieu. Les Douze l’accompagnaient, ainsi que des femmes qui avaient été guéries de maladies et d’esprits mauvais : Marie, appelée Madeleine, de laquelle étaient sortis sept démons, Jeanne, femme de Kouza, intendant d’Hérode, Suzanne, et beaucoup d’autres, qui les servaient en prenant sur leurs ressources.
(...) Le trajet se fait rapidement sur ces ânes bien nourris. Dans le clair de lune, on a dépassé Cana.
« Si tu permets, je pars en avant. J’arrête le char. Les secousses la font tellement souffrir !
– Vas-y. »
Jonathas pousse son cheval au galop.
Après un assez long parcours au clair de lune, voilà que se dessine la forme sombre d’un grand char couvert, arrêté au bord du chemin. Jésus pique son âne qui part au petit galop. Le voilà près du char. Il descend.
« Le Messie ! » annonce Jonathas.
La vieille nourrice se précipite du char sur la route, et de la route dans la poussière.
« Oh ! Sauve-la ! Elle est en train de mourir.
– Me voici. »
Jésus monte sur le char où on a étendu un tas de coussins ; sur eux se trouve un corps frêle. Dans un coin, il y a une lanterne, des coupes, des amphores. A côté, une jeune servante pleure en essuyant la sueur froide de la mourante. Jonathas accourt avec une des lanternes du char.
Jésus se penche sur la femme qui se laisse aller ; elle est vraiment sur le point de mourir. Il n’y a pas de différence entre la blancheur de son vêtement de lin et la pâleur légèrement bleutée des mains et du visage émaciés. Seuls d’épais sourcils et de longs cils très noirs donnent quelque couleur à ce visage de neige. Elle n’a même plus ce rouge de mauvais augure des poitrinaires sur ses pommettes décolorées. On voit une ombre rose violette, ce sont ses lèvres entrouvertes à cause de sa respiration difficile.
Jésus s’agenouille à côté d’elle et l’observe. La nourrice lui prend la main et l’appelle. Mais l’âme, déjà sur le seuil de l’éternité, n’a plus aucune conscience.
Les disciples et les deux jeunes gens de Nazareth sont arrivés et se pressent contre le char.
Jésus met une main sur le front de la mourante qui ouvre un instant ses yeux embrumés et vagues, puis les referme.
« Elle a perdu conscience » gémit la nourrice.
Et elle pleure plus fort.
Jésus fait un geste :
« Mère, elle va entendre. Aie confiance. »
Puis il appelle :
« Jeanne ! Jeanne ! C’est moi ! C’est moi qui t’appelle. Je suis la Vie. Regarde-moi, Jeanne. »
Avec un regard plus vivant, la mourante ouvre ses grands yeux noirs et observe le visage penché sur elle. Elle a un mouvement de joie et sourit. Elle remue doucement les lèvres pour dire un mot qui, pourtant, n’arrive pas à se faire entendre.
« Oui, c’est moi. Tu es venue, et je suis venu te sauver. Peux-tu croire en moi ? »
La mourante fait un signe de la tête. Toute sa vitalité se rassemble dans ses yeux, qui disent tout ce que la parole ne peut exprimer autrement.
Jésus, tout en restant à genoux et la main gauche sur son front, se redresse et prend son attitude de miracle :
« Eh bien, je le veux. Sois guérie ! Lève-toi. »
Il retire sa main et se met debout.
Une fraction de minute après, Jeanne, femme de Kouza, sans aide d’aucune sorte, s’assied, pousse un cri et se jette aux pieds de Jésus, en criant d’une voix forte, heureuse :
« Oh ! T’aimer, ma Vie ! Pour toujours ! Je suis à toi ! Je suis à toi pour toujours ! Nourrice ! Jonathas ! Je suis guérie ! Ah ! Vite, courez le dire à Kouza. Qu’il vienne adorer le Seigneur ! Oh, bénis-moi, encore, encore, encore ! Oh, mon Sauveur ! »
Elle pleure et rit tout à la fois en baisant les vêtements et les mains de Jésus.
« Je te bénis, oui. Que veux-tu que je fasse d’autre pour toi ?
– Rien, Seigneur. Seulement que tu m’aimes et me permettes de t’aimer.
– Tu ne voudrais pas un bébé ?
– Oh, un bébé !… Mais fais ce que tu veux, Seigneur. Je t’abandonne tout : mon passé, mon présent, mon avenir. Je te dois tout et te remets tout. Toi, donne à ta servante ce que tu sais être le meilleur.
– La vie éternelle, alors. Sois heureuse. Dieu t’aime.
Je m’en vais. Je te bénis et je vous bénis.
– Non, Seigneur. Arrête-toi dans ma maison qui, maintenant, est réellement un rosier fleuri. Permets-moi d’y rentrer avec toi… Ah, que je suis heureuse ! (...)
[...] Il est inutile de chanter que le Christ doit régner, dans des assemblées occasionnelles que l’on peut trouver provocantes. Chantez ce règne du Christ par votre vie et vos œuvres, instaurez-le par une action patiente de maîtres d’amour et de médecins spirituels, parmi les ignorants, les fous, les malades spirituels. Soyez des médecins et des maîtres, non seulement pour les bons, mais pour tous. Comme je l’ai moi-même été.
Être prêtre ne doit pas constituer une singularité qui soit source d’honneurs et épargne ce que les hommes ont à subir : le travail, la fatigue, la pauvreté, la faim. Moi, j’ai connu la faim, or j’étais Dieu. J’ai connu la fatigue, la pauvreté, le travail, or j’étais Dieu. J’ai vécu dans les dangers, je n’ai pas cherché à les esquiver, or j’étais Dieu.
Prenez les plus saints d’entre vous, et disséminez-les. Il faut que, en même temps, dans le silence et la discrétion, une armée mystique les soutienne par la prière, la pénitence, la souffrance. C’est celle des âmes mystiques, les Moïse sur la montagne (Ex 17, 9-13.), pendant que les Josué combattent dans la plaine et vainquent par la seule arme de l’Évangile et d’une vie authentiquement évangélique. Ils doivent lutter et remporter la victoire avec et pour l’Évangile. Agissez sans retard. Vous ne savez pas si cela vous sera encore possible dans quelque temps.
Pourquoi n’imite-t-on pas, sur cette terre de martyrs et de saints où se trouve le cœur de l'Église, ce qui se fait déjà dans d’autres pays, et avec fécondité, par amour de Dieu et pour défendre l'Église, la morale, la civilisation chrétienne, qui est toujours liberté et paix ?
Vous attendez tout de moi et de Marie ? Vous devez vous aussi vouloir votre bien, et celui du monde entier. Ne vous laissez pas enivrer par les victoires temporaires. Que les Moïse sur la montagne prient, souffrent et offrent pour le clergé missionnaire en Italie et pour leurs assistants catholiques. Que ces prêtres missionnaires et leurs assistants catholiques œuvrent dans leur patrie, afin que l’Évangile, l’Église, les sacrements servent de contre-poison, de vie, de lumière, de vérité, et soient répandus là où ils ne vont pas, pour ceux qui ne viennent pas à vous – ou, s’ils viennent, ils ne comprennent pas ‑, pour les pécheurs, et même pour les antéchrists, parce qu’ils sont “dans l’ignorance”.
Au jour du jugement, c’est à vous que je demanderai, plus qu’à eux : “Pourquoi m’avez-vous laissé être persécuté ?”
Car, en vérité, permettre par tiédeur, par peur ou par orgueil, que l’ignorance de moi et de ma vérité demeure et que l’erreur s’enracine, cela revient à me persécuter. Ni plus ni moins que les personnes qui le font sans malice, ou parce qu’on les y incite, ou encore parce qu’il leur est impossible de réagir à cette incitation à cause de leur incapacité à distinguer la vérité du mensonge. Cette incapacité est une conséquence de leur méconnaissance de la vérité ; elles sont tenues dans l’ignorance par les serviteurs de Satan, qui veut en faire des armées d’esclaves, des masses passives, délirantes de haine, ivres de fausses illusions, trompées par d’habiles mensonges, à utiliser contre le Christ et l’Église enseignante et militante.
Ne permettez pas que cela arrive. Allez, descendez, mêlez-vous à ces foules qui meurent, spirituellement, de faim, et distribuez-leur le pain de la vérité. Ma Parole est vérité et vie. Allez. Enseignez. Aimez. [...]