En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander : “Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir.” Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : “Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose.” Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut. Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira. Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ? ou lui donnera un scorpion quand il demande un œuf ? Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »
“ Donne-nous notre pain quotidien. ”
Quand vous serez au Ciel, vous vous nourrirez uniquement de Dieu. La béatitude sera votre nourriture. Mais, ici-bas, vous avez encore besoin de pain. Et vous êtes les petits enfants de Dieu. Il est donc juste de dire : “ Père, donne-nous du pain. ”
Avez-vous peur qu’il ne vous écoute pas ? Oh, non ! Réfléchissez : supposez que l’un de vous ait un ami et qu’il s’aperçoive qu’il manque de pain pour rassasier un autre ami ou un parent arrivé chez lui à la fin de la seconde veille. Il va trouver l’ami son voisin et lui dit : “ Mon ami, prête-moi trois pains, car il m’est arrivé un hôte et je n’ai rien à lui donner à manger. ” Peut-il s’entendre répondre de l’intérieur de la maison : “ Ne m’ennuie pas car j’ai déjà fermé la porte et bloqué les battants, et mes enfants dorment déjà à mes côtés. Je ne peux me lever et te donner ce que tu désires ” ? Non. S’il s’est adressé à un véritable ami et qu’il insiste, il obtiendra ce qu’il demande. Il l’aurait obtenu même s’il s’était adressé à un ami pas très proche, à cause de son insistance, car celui auquel il demande ce service, pour n’être plus importuné, se hâterait de lui en donner autant qu’il en veut.
Mais vous, quand vous priez le Père, vous ne vous adressez pas à un ami de la terre : vous vous tournez vers l’Ami parfait, qui est le Père du Ciel. Aussi, je vous dis : “ Demandez et l’on vous donnera, cherchez et vous trouverez, frappez et l’on vous ouvrira. ” En effet, à qui demande on donne, qui cherche finit par trouver, à qui frappe on ouvre la porte.
Quel enfant des hommes se voit présenter une pierre, s’il demande du pain à son père ? Qui se voit donner un serpent à la place d’un poisson grillé ? Le père qui agirait ainsi à l’égard de ses enfants serait criminel. Je l’ai déjà dit et je le répète pour vous encourager à avoir des sentiments de bonté et de confiance. De même qu’un homme sain d’esprit ne donnerait pas un scorpion à la place d’un œuf, avec quelle plus grande bonté Dieu ne vous donnera-t-il pas ce que vous demandez ! Car il est bon, alors que vous, vous êtes plus ou moins mauvais. Demandez donc avec un amour humble et filial votre pain au Père.
“ Remets-nous nos dettes comme nous les remettons à nos débiteurs. ” (…)
Jésus dit :
“Dieu n’a pas envoyé son ange pour dire ‘Ave’ seulement à Marie. Dieu vous salue, ô chers enfants, avec ses attentions. Il vous envoie ses saintes inspirations par ses anges ; Dieu vous apporte ses bénédictions du matin au soir et du soir au matin. Vous êtes toujours entourés des ondes aimantes et prévoyantes de la pensée de Dieu.
Comment se fait-il alors que vous ne ressentiez rien ou si peu ? Comment se fait-il que vous ne viviez pas dans la justice et la sainteté ? C’est parce que vous êtes devenus imperméables à l’influence de la grâce, parce que votre volonté contraire au bien vous a rendus réfractaires à l’action de l’amour.
Gabriel dit à Marie : ‘Ave’, et le son de la voix angélique apporta une nouvelle vague de grâce sur Celle qui en était déjà inondée. La lumière très vive de son esprit immaculé atteignit la luminosité suprême, car la réponse de l’esprit de Marie fut parfaite.
Humilité, promptitude, pudeur, prière... que ne trouva pas de sublime la parole angélique pour devenir la première étincelle de l’incendie de l’Incarnation ? Grand fut le don que fit l’Eternel à Celle qu’il avait choisie – il la préserva de la faute originelle – pour être le premier tabernacle du corps du Fils. Mais quelle ne fut pas la plénitude de la réponse de Marie !
Si, non seulement les dons secrets que seul Dieu savait avoir donnés, mais aussi les dons manifestes dont on se rend compte – tels que l’intelligence suprême, les instructions surnaturelles, les contemplations brûlantes, et je ne parle que des dons moraux et spirituels – si ces dons avaient été prodigués à une autre créature, comment ne s’en serait-elle pas, au moins de temps en temps, glorifiée ?
Mais pas Marie. Plus Dieu l’élevait vers son trône et plus augmentaient en elle la reconnaissance, l’amour et l’humilité. Plus Dieu lui faisait comprendre que sur elle s’étendait la main de Dieu pour la protéger contre tous les pièges du mal et plus elle devenait vigilante contre le mal.
Marie n’a pas commis l’erreur qui fait s’effondrer tant d’âmes, capables de perfection ; elle n’a jamais dit : ‘Je sens que Dieu veille sur moi, je sens que Dieu m’a choisie. Je lui laisse le soin de me défendre contre l’Ennemi’. Non. Tout en reconnaissant l’œuvre de Dieu en elle, Marie agit comme si elle était la plus dénuée de toutes les créatures en dons spirituels. De l’aube au coucher du soleil, et même pendant son sommeil virginal sur lequel les anges veillaient, son âme restait vigilante.
Ne croyez pas que la tentation ait épargné Marie. Le Tentateur ne m’a pas épargné, moi ; il avait une double raison de ne pas épargner Marie. Double raison. La première : Marie était la créature sans tache, mais néanmoins une créature ; moi, j’étais Dieu. La deuxième : il était plus important pour Lucifer de corrompre le sein de la femme qui aurait porté le Christ que d’attaquer le Christ même.
Le Rusé savait que le Verbe se serait fait chair, par une fusion d’esprit à Esprit, dans un sein où ne logeait aucun péché. Aucun péché, je répète. Si, depuis Eve, il avait réussi à induire en tentation toutes les femmes, il aurait été sûr qu’il ne serait jamais vaincu par le Vainqueur éternel.
Une seule lui a toujours résisté : Marie. Et Un seul sait quelle dentelle, quelle filigrane de séduction tendit Lucifer autour de Marie pour secouer et ternir son âme super-angélique. Et c’est Dieu. Mais étant donné que certains secrets sont trop grands pour vous, il ne vous les dira pas. C’est à partir de la splendeur de Marie au ciel que vous comprendrez la grandeur de son âme. Une grandeur obtenue par sa propre volonté, et qui aurait été sublime même sans secours suprêmes, tant elle voulut être sainte par amour de son Dieu.
C’est donc avec raison que l’Ange put dire : ‘Pleine de grâce’. Oui, pleine de grâce. La Grâce était en elle. La Grâce, c’est-à-dire Dieu, et la grâce, c’est-à-dire le don de Dieu, qu’elle sut faire fructifier à mille pour cent.
Voilà ce qu’il faut, mes enfants, pour faire en sorte que les choses célestes conçoivent le Christ en vous : que vous adhériez à la grâce, que vous recueilliez la grâce, que vous multipliiez la grâce, que vous aspiriez la grâce. Pour vivre, le corps doit aspirer de l’air et absorber de la nourriture. Pour vivre, l’âme doit aspirer la grâce. Alors la Lumière peut descendre là où elle peut s’incarner, et le Christ naît mystiquement en vous comme il naquit réellement en Marie.
Je te salue, Marie, pleine de grâce. Regardez-la, vous tous, ô chrétiens si dissemblables au premier Fils de Marie ; regardez-la, surtout vous, les femmes, si dissemblables à Marie, et apprenez, et méditez sur le fait que le chemin du mal aux mille formes, c’est vous qui l’avez ouvert avec votre sujétion à la chair, si contraire à la vie de la grâce dans les créatures, sans laquelle l’être humain devient un démon et le monde un enfer.”
Les Cahiers de 1943, 4 septembre